Artisanat des sculptures en pierre de la période grecque archaïque à Marseille : approche interdisciplinaire archéologique et scientifique de l’étude des Naïskoi

Nicolas Bouillon (CICRP) et Laura Rohaut (CCJ)
21 Septembre 2015

Quarante-sept sculptures, représentant des petits temples (naïskoi, en grec) à l’intérieur desquels une divinité est figurée assise, ont été en grande majorité mises au jour en 1863, dans l’ancienne rue Négrel, lors des grands travaux d’aménagement de la ville avec la création de la rue Impériale (actuelle rue de la République). Il s’agit d’une collection exceptionnelle par son nombre mais également par l’intérêt scientifique et historique qu’elle suscite. Une thèse est actuellement en cours dont les problématiques sont axées sur l’étude de l’artisanat des sculptures, de l’origine du motif iconographique et de la signification de ces édicules datés de l’époque archaïque. Une méthodologie scientifique innovante, utilisant l’imagerie sous différente longueur d’onde, l’analyse non destructive in situ par micro-fluorescence X et les techniques micro-destructives à partir de coupes stratigraphiques de prélèvements (cartographie élémentaire SEM-EDX), a été utilisée pour définir les profils d’altération, caractériser la nature de la pierre sculptée et les techniques de polychromie dans le but de compléter l’étude archéologique. L’origine de la pierre, la nature des pigments, la connaissance des techniques de polychromie, ou encore, la mise en évidence de traces d’outil sont autant d’éléments qui nous renseignent sur le mode de production, la fonction de ces objets, la spécificité de ces représentations dans la monde grec à la période archaïque.

Une comparaison avec les autres naïskoi, datés de la fin du VIe s. av. J.-C. et du début du Ve s. av. J.-C., découverts en Grèce de l’Est (Asie Mineure), en Mer Noire, en Grèce du Nord et en Grèce d’Occident, est un pan important du travail de recherche de L. Rohaut, dans le cadre de sa thèse. Aujourd’hui conservés dans divers musées européens et turques, l’étude de ces exemplaires a permis de replacer la collection marseillaise dans un contexte méditerranéen plus large et de mieux comprendre la diffusion des cultes et des pratiques artisanales de cette époque. La modélisation 3D pourrait se révéler un outil très puissant en termes de recherche pour l’étude géométrique comparative des différentes pièces. Elle peut constituer le support d’une nouvelle méthodologie documentaire scientifique basée sur une approche multi-variable spatialisée. En outre ces nouvelles technologies possèdent un très fort potentiel en termes de valorisation muséographique et de diffusion multimédia grand public (reconstitution digitale des polychromies, réalité augmentée…).